[Almanach] Lucien Suel …

[Il écrit dans l’espace, de sa voix, y ouvrant des chemins de mots
comme un explorateur dans la jungle amazonienne de son coupe choux.
Ici aussi ça coupe … mais un tout autre légume.]

Samedi 31 mai 2008
Les éditions Publie.net donnaient
« Coupe Carotte »
de Lucien Suel
« 6″

                     LA COMMISSION DE SURVEILLANCE-letcr1-exp          

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Le passage en son entier

 


Lucien Suel  aux éditions Qazaq

Lucien Suel  aux éditions Publie.net


Personne ne songe à le contester. Utilité des travaux menés par la commission docte de surveillance. La commission de surveillance rend des sentences sûres et éclairées au sujet du savon en paillettes et du fil de fer galvanisé. Nous payons pour savoir. Nous atteindrons un jour la stratosphère, ménagères pratiques de sens à un sou près. Ce qui se mange coûte de jour en jour plus cher. C’est la guerre. Il ne faut pas espérer profiter des douceurs et de l’abondance /

[Almanach] Marc Bonneval …

[Le titre du poème est l’annonce d’un voyage
au cœur du vivant
le poème tient cette promesse. ]

Dimanche 30 mai 2010
Les éditions Ouvres Ouvertes
qui, elles aussi tiennent (depuis 16 ans) la promesse de leur nom
publiaient
de Marc Bonneval
« Du lieu à l’être » (6)

(Poème que Laurent Margantin, donnait
le mois de la disparition de l’auteur )

EST CE PRÉSOMPTION SENTIR-LETCR1-EXP1                               

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Proposition de lecture :


Le poème en son entier se trouve (6 parties) ici 


Le temps est à l’attente. L’attente est le temps.
Et l’attente est sans savoir, et sans sagesse.

Pourtant, l’attente n’est pas aisée, il est besoin de savoir. Et de reconnaître le juste temps de l’attente, pour l’attente.

L’enfant, qui ne sait pas encore qu’il est un enfant, et il l’oubliera. Moi aussi, et j’ai oublié.

La terre nous est-elle familière ? La sécurité que donnent le jour, et la nuit, nous l’avons conquise, et tous les métiers y contribuent.

Sauf l’été méditerranéen, je ne connais pas de moment où le jour soit absolue certitude, et la nuit consolatrice de son ardeur.

Est-ce présomption, sentir que la beauté – de ce paysage, de cette lumière, de ce crépuscule – rejoint la douleur pure ?

Il n’est pas vrai que tout « ici » en vaille un autre : il en est qui ne donnent que le désir d’être ailleurs, il en est dont il ne faudrait jamais partir, dont jamais il n’aurait fallu partir.

Mais on n’aurait jamais su, ni la douleur, ni l’absence, ni peut-être le plaisir. On ne sait jamais ce qu’il faut, tout au plus ce qui a eu lieu, et encore y faut-il et le temps, et toute la distance qui se creuse, d’un lieu à l’autre, d’un temps à l’autre.)

Ce paysage invite à deviner ce qui pourrait être vraiment visible, et que pourtant l’on ne voit pas. Ce n’est qu’au paradis que les bienheureux pourront, et peuvent déjà, contempler pour l’éternité la face de Dieu.

Il n’est pas vrai que le lieu suffise. Le lieu est, et, pour accéder à son être, il y faut davantage que le séjour. Et tout séjour n’est pas présence, et donc joie.

[Almanach] Matthieu Hervé …

[Des traces de vie suivies en des lieux dispersés,
comme les touches d’un clavier
dont le narrateur jouerait . ]

Vendredi 30 mai 2014
Les éditions Publie.net donnaient
de Mattieu Hervé
« Monkey’s Requiem »
(Le peintre exclusif)

IL RÉPÈTE SOUVENT FAIRE DE LA PEINTURE -letcr1-exp                               

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Proposition de lecture :

 


Récemment une version papier qui inclut l’accès au format numérique
a été publiée par le même éditeur … c’est  ici


Parfois, pris d’absinthe et de mélancolie, il évoque une femme, Augustina, tenancière d’un bar, qui lui a permis d’y organiser une exposition d’estampes japonaises. Elle est modèle pour bon nombre de ses amis, et sans doute un peu pute. Il l’a aimée, beaucoup, même s’il répète souvent, faire de la peinture et aimer les femmes, voilà qui est incompatible, c’est emmerdant, et il l’a peinte, en robe et pensive, nue et lascive. Une relation désastreuse terminée quelques mois avant son départ de Paris.

Lecture

Pourquoi sur les liseuses, alors que du point de vue de l’ingénieur il est moins « efficace » le doigt qui passe sur l’écran l’a-t-il emporté sur le bouton tourne page.

Une hypothèse :

UN DES PLAISIRS DE LA LECTURE -letcr1-exp1

Quant à la page dont on se sait hors du virtuel …


Un des plaisirs de la lecture, naît du bout des doigts, dans cette recherche de la page suivante, qui a pour nom effeuillage.

[Almanach] Philippe Castelneau …

[Un esprit et un corps en ballade avec des souvenirs d’autres lieux,
d’autres sons … d’autres…]

Vendredi 29 mai 2015
Les éditions Publie.net donnaient
de Philippe Castelneau 
« L’appel de Londres »
(gentlemen take polaroids)

                                 […d’autres pluies aussi]     LONDRES OU TOKYO C EST PAREIL-letcr1-exp
                               

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Lecture du passage par Philippe Castelneau itself

D’autres passages ici


Récemment une version papier qui inclut l’accès au format numérique
a été publiée par le même éditeur.


« La musique de Philip Glass » … »Einstein on the beach »


La photo est un souvenir échoué, balayé par les vents contraires de ma mémoire subjective. Sept ans ont passé, je suis à Londres et je me souviens de Tokyo. Cette photo-là n’a rien à voir, et pourtant. Je ferme les yeux. Einstein on the Beach. La musique de Philip Glass, le rêve se poursuit. La nuit à Londres rappelle la nuit à Tokyo. À Tokyo je sors de l’hôtel, les taxis vert bouteille alignés ont leurs moteurs qui tournent, les chauffeurs aux gants blancs fument en attendant le client, imperturbables. À Londres les taxis sont noirs, ils passent en silence. À Tokyo je marche jusqu’à épuiser la nuit. Je traverse Roppongi, je cours pour rejoindre la tour de Tokyo. En chemin, les vieux qui vont se coucher dans les parcs, les buildings, les lumières, le bruit des pachinkos les néons des combinis la ville de métal et de verre : la nuit à Tokyo, ça n’existe pas, le noir complet n’existe pas, c’est un voile qui tombe sur la cité ; les vieux s’endorment le voile tombe quelque chose se lève qui occupe la ville, quelque chose autre qui vient occuper la nuit. Tout le voyage, mon appareil photo n’a pris que des photos floues, souvenirs imprécis d’un rêve incertain, photos presque effacées, ombres fondues, images vagues d’un songe vaporeux. Dans la nuit le monorail Yurikamome traverse la baie pour rejoindre l’île d’Odaiba. Je suis debout dans le wagon vide au-dessus du Rainbow Bridge, le visage collé à la vitre, la pluie fine, les gouttes glissent sur ma joue de l’autre côté. À Londres il pleut aussi, je marche d’un pas rapide, Londres ou Tokyo, c’est pareil, toujours la nuit je marche. Je cours encore, toujours je cours. Je cours pour me retrouver, mais c’est chaque fois trop tard.

[Almanach] Zyrànna Zatèli …

[Un recueil de nouvelles, traduites du grec par Michel Volkovitch.
La nouvelle citée ici évoque d’étranges lettres
et un personnage tout aussi étrange
malmené par le destin et ses auxiliaires : les proches.]

Jeudi 28 mai 2009
Les éditions Publie.net donnaient
de Zyrànna Zatèli 
« Gracieuse dans ce désert »
(extrait de la nouvelle « Lettre du moyen âge« )

                                        IL BÉGAYAIT TELLEMENT QUE LE TEMPS -letcr1-exp2                               

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Proposition de lecture :


Récemment une version papier qui inclut l’accès au format numérique
a été publiée par le même éditeur.


Tous les deux ou trois jours, Tàkis passait dans les magasins, une gamelle de l’armée à la main ; on lui donnait une tomate, ou une pomme, le boulanger un demi-pain, le poissonnier deux sardines — un jour, quelqu’un eut l’idée macabre d’y mettre, enveloppé dans du papier sulfurisé, un rat crevé. Tàkis n’avait qu’un frère, qui une fois marié, disait-on, l’avait chassé de chez lui ; ou plutôt c’était sa femme, elle avait honte de son beau-frère fou, la malheureuse. C’est ton frère ou moi, avait-elle dit, mais ce n’était peut-être que des bobards. Lui-même n’en parlait jamais — il bégayait tellement que le temps qu’il dise bonjour, il faisait déjà nuit, à la longue il finit même par ne rien dire du tout, déambulant bouche cousue, mis à part un hennissement sauvage qui parfois tombait de sa bouche, rire ou plainte, selon. Car on savait à peu près s’il riait ou pleurait. À son regard, à sa façon de réagir. On lui disait Salut, capitaine ! et ses yeux étincelaient de joie, son visage s’adoucissait, le hennissement était un rire. On lui disait Salut, pope ! et tout entier il s’assombrissait, ses yeux noirs, ne pouvant noircir davantage, s’enfonçaient dans leurs orbites, le hennissement était une plainte. Il ramassait des pierres, les jetait en tous sens et gare à qui se trouvait là. Il ne supportait pas d’être appelé pope. Le rêve de sa vie : être capitaine. Voilà pourquoi Artèmios T. lui accorda cette faveur.
Artèmios T., commandant des gardes mobiles, venait d’ailleurs, et nous n’aurions su dire, jusqu’alors, de quel bois il était fait ; mais quand, près de la soixantaine, il s’amouracha d’Àspa K., une délicate créature qui avait le tiers de son âge, et qu’il réussit à l’épouser non sans mal, cet amour tardif et brûlant le rajeunit, lui donna ce qu’on appelle un « cœur d’or », au point qu’il prit sous sa protection tous les humbles et les opprimés, Tàkis en tête.
— Tu veux être capitaine, mon garçon ? Tu l’es ! dit-il en guise de baptême, et il lui donna une vieille capote encore solide, un pantalon kaki, une chemise kaki, un pull, un maillot de corps, des godillots, un béret de capitaine, et même des gants de laine kaki et un caleçon. Il lui céda aussi un coin pour dormir dans un magasin des gardes mobiles, avec un lit de camp, des couvertures, un oreiller, plus un poêle pour l’hiver.
— Ça te va, mon garçon ? Tu veux autre chose ?
Tàkis fit non de la tête.
— Une femme, peut-être ?
Il refit non.
— Une gamelle pour ton manger ?
— Oui, dit Tàkis, et c’est ainsi qu’il obtint la gamelle.
Trois ans plus tard, hélas, Artèmios T. prit sa retraite et s’en fut avec Àspa et leurs deux enfants, puis on ne tarda pas à liquider les gardes mobiles, on vida les grandes salles, les magasins, tout. L’édifice appartenait à la commune, qui mit les scellés en attendant qu’on le démolisse, quelques années plus tard ; seul un assez grand espace, derrière, plein de broussailles et de cognassiers stériles, qu’on appelait généreusement verger, resta ouvert au public, ainsi que les cabinets, au fond. La région produisant du tabac, les gens des maisons alentour venaient y étendre leurs feuilles de tabac pour les faire sécher au soleil ; certains tentèrent de faire pousser des tomates et des melons, mais rien à faire, la terre était stérile, elle n’acceptait que des chardons et des cognassiers sans coings.

[Almanach] Lucien Suel …

[Lucien met son regard, son oreille,
et les lumières qu’il abrite
en des lieux et des temps
dont il partage volontiers les trésors.]

Mardi 27 mai 2008
En son SILO
Lucien Suel évoquait
« Fleury-Joseph Crépin« 

TU AS ÉTÉ PLOMBIER -letcr1-exp

                                                                       

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Le passage en son entier


Lucien Suel  aux éditions Qazaq


Fleury-Joseph Crépin tu entends une voix elle
te dit à vos couleurs Fleury-Joseph il faudra
peinturer 300 tableaux pour arrêter la guerre
et 45 autres pour établir durablement la paix
45 toiles peintes comme 45 temples de la paix

Pacem in terris tu t’exécutes jusqu’à la mort
tu peins de l’âge de 63 ans à l’âge de 73 ans
sous l’influence de ton ange gardien tu peins
consciencieusement tu dates et numérotes tous
tes tableaux tu les fais à partir des dessins
préparatoires sur ton papier quadrillé papier
de la symétrie tu seras enterré avec tous tes
quadrillages crayonnés l’ensemble des croquis
capitonnage tapissant l’intérieur de ta bière

seuls témoignent pour la postérité pour notre
édification toutes les toiles achevées durant
ces dix années je te regarde Fleury-Joseph tu
appliques tes couleurs à l’huile sur la toile
tu laisses tomber des gouttelettes des perles
de vernis coloré tu travailles avec la grande
minutie des bons artisans dans l’espace blanc
tu traces et colories tes motifs géométriques
tu travailles comme un plombier qui soigne tu
sais qu’il faut être précis pour ne pas avoir
de fuites au moment de la mise en eau pour ne
pas devoir recommencer tes soudures tu as une
oeuvre à accomplir comme Jeanne de Domrémy et
comme Augustin de Ferfay tu as été choisi par
les esprits une tâche pour le reste de ta vie

o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o

j’aime beaucoup c’est beau ton premier prénom
Fleury fleur Fleury fleur Fleury fleur Fleury
tu t’appelles Fleury mon grand-père s’appelle
Fleury aussi un prénom que l’on ne donne plus
guère de nos jours vous êtes morts les Fleury

mon Fleury était bûcheron terrassier forgeron
jardinier ajusteur ouvrier poilu de 1914-1918
toi Fleury-Joseph tu as été plombier zingueur
quincaillier compositeur de musique rebouteux
puisatier sourcier et finalement peintre pour
la paix artisan de paix c’est toi qui stoppes
les boches avec ton trois-centième tableau tu
contrains l’ennemi à capituler à signer enfin
la paix la deuxième guerre mondiale est finie
lorsque le 7 mai 1945 tu poses l’ultime perle
colorée sur la composition n° 300 Pax Crepina

o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o

tu es né à Hénin-Liétard avant qu’on le nomme
Hénin-Beaumont tu es né dans le Pas-de-Calais
comme Augustin Lesage comme Victor Simon deux
personnages singuliers tes prédécesseurs dans
le spiritisme quand je traverse Hénin-Liétard
je pense à toi je pense aussi au premier film
de Maurice Pialat l’enfance nue tableau animé
pour conjurer la solitude la détresse sociale

o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o°o

crépin crépine crépinette j’entends les tiots
qui se moquent jouent avec ton patronyme dans
la cour de l’école crépi crépin crétin crépin
crépin crépine crépinette sacré crépin crépin
les peintures crépin crapette sa-cré pein-tre

dans leur innocence les enfants annoncent ton
futur crépi du bâtiment ta crépine au fond du
puits ils se trompent juste sur la crépinette
puisque tu ne seras jamais un charcutier mais
qu’au contraire tu feras arrêter la boucherie

 

[Almanach] Rolland Garros 1931 …

[A l’époque ce fut un véritable événement
scandaleux pour les uns
libérateur pour beaucoup d’autres.]

Mercredi 27 mai 1931
Mademoiselle Elia María González-Álvarez
(il n’est pas interdit de reprendre ici sa respiration)
y López-Chicheri,
comtesse de la Valdène
plus connue sous le diminutif  de Lili de Alvarez
fait sensation

27-05-1931-POUR LA PREMIÈRE -letcr1-exp

                                                                       

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Précisions sur la tenue  (si le lien n’existe plus merci de me le signaler)
Précisions sur une femme qui sort de l’ordinaire


 

[Almanach] André Dhôtel …

[L’un de ses romans que l’on dira
dédié aux enfants.
Pas faux…
et pourtant.]

Vendredi 26 mai 1978
Les éditions Gallimard publiaient de
André Dhôtel
« L’enfant qui disait n’importe quoi« 

C EST PLUS VRAI QUE TOUT -letcr1-exp

                                                                       

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La première édition de ce roman est du 30 octobre 1968


Proposition de lecture :


— Qu’y a-t-il ?
— Son regard, reprit Alexis.
— Nous on n’a rien remarqué assura Didier. |
— Mais moi j’étais seul devant elle et tout près. Je ne peux pas vous dire quelle impression j’ai eue. Elle a une façon de vous regarder qui vous réduit à rien.
— Quelle façon ? demanda Sylvère. Il ne s’agit pas de faire de la fantaisie. Dis-nous exactement.
— Exactement, murmura Alexis tout dérouté.
Il resta muet une bonne minute puis il dit à Sylvère :
— Tu peux te moquer, mais je vais t’en parler de sa façon de regarder. Figure-toi, c’est un regard instantané et malgré cela son regard change. D’abord comme celui d’un tireur qui vise avec soin, à la fois aigu et patient. Et puis il s’agrandit son regard et il y passe une grande douceur. Enfin il devient tout lumineux comme celui de quelqu’un qui a compris et qui peut comprendre n’importe quoi. C’est plus vrai que tout ce que j’ai jamais vu dans la campagne ou dans les yeux des bêtes ou dans le ciel.
— Tu nous en diras tant, murmura Sylvère.
Ils demeurèrent tous rêveurs. Que cette fille fût ou ne fût pas Blandine, elle représentait soudain ce qu’ils cherchaient depuis toujours à ce qu’il leur semblait : la franchise totale, sans la plus petite ombre.

 

[Almanach] Anh Mat …

[Celui qui accompagne Anh Mat
s’apprête à descendre aux enfers.]

Lundi 26 mai 2014
Sur site des cosaques des frontières (Jan Doets)
Anh Mat
donne « Au pas de la porte de l’enfer« 

L APATRIDE NE SAIT MÊME-letcr1-exp

                                                                       

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Proposition de lecture :


Du même auteur
aux éditions Qazaq  : cent trente cinq cartes postales de la Chine ancienne

aux éditions Publie.net : Monsieur M


Au pas de la porte de l’enfer, je quitte l’apatride.

Il me salue brièvement de la main s’épargnant ainsi un baiser qui n’a plus lieu d’être entre nous. Et puis les mains dans le dos, sa silhouette disparaît au loin dans la marée humaine de ce jour gris.

L’apatride faiblit. Sa pensée se gâte. Son souffle est de plus en plus court. Sa tête de plus en plus basse. Et son regard se perd dans l’angoisse renouvelée de chaque seconde lui passant sur le corps et le visage.

Chacune de nos rencontres le rapproche d’une effrayante sénilité. Et lui déjà prêt à se suicider si écœuré à l’idée de finir infirme et baveux sur un fauteuil me confiait il y a peu ceci   :

«   La mort   ? J’ai hâte…   »

Aujourd’hui, nous ne nous sommes rien dit. De toute façon, l’apatride ne sait même plus s’exprimer. Il a comme perdu le chemin de la parole dans le langage. Les langues qui autrefois l’ont habité désormais se mélangent formant ainsi un dialecte insaisissable et incompris de tous. Alors il se tait. Longtemps. De longues heures. Des années. À force son haleine est devenue abominable, sèche, empuantie d’une vague odeur de cadavre. Probablement celui des mots morts du ressentiment de n’avoir pas su les adresser.