Sculpteur et peintre, Henri Charlier évoque dans ce passage de « l’Art et la Pensée » la distance irréductible qui sépare le langage des mots de celui que l’artiste produit à chacune de ses oeuvres.
Le passage mis en grille aurait pu être une déclaration du célèbre amateur de chocolat Lanvin … la plupart des nombreux artistes sont réduits se soumettre à cette contrainte incontournable dans un monde de « concepts en mots« .
« Chez les gens cultivés eux-mêmes, le système de pensée des artistes est rarement compris ; on lui refuse même d’être un système de pensée.
Il y a certes des gens très sensibles aux beaux-arts et dont c’est le moyen normal de penser, même s’ils ne sont pas artistes créateurs. Ils les comprennent directement ; ils n’éprouvent aucun besoin de se les expliquer par des mots, c’est-à-dire de faire une traduction. L’œuvre leur paraît toujours plus riche de sens que les mots. Mais les autres demandent une explication ; ils ne veulent pas croire que mon idée c’est ma statue ; ils veulent qu’elle soit la traduction en pierre d’une de leurs idées verbales
Et, suivant qu’ils sont poètes, philosophes, savants, ils demandent une explication poétique, savante ou philosophique. Or, une traduction est impossible ; deux langues différentes appartiennent encore à un même système de pensée, puisque dans l’une et l’autre les concepts se fixent sur des mots qui sont comme les signes du concept [note personnelle : ou paraissent l’être]. Mais dans les beaux-arts, les signes n’ont de sens que par leur place ; ils sont en quelque sorte créés pour chaque cas particulier ; leur généralité vient du rapport qu’ils ont entre eux. »
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