[Almanach] … Pascal Gibourg

[L’errance de l’aliéné]

Dimanche 13 Juillet 2008
aux éditions Publie.net
Pascal Gibourg
donnait :
Facultés de Michaux

 CELUI QUI EST PASSÉ-letcr1-exp

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L’extrait complet


Avec la drogue, et suite à une erreur de dosage, il fera lui-même l’expérience de la démence. Une expérience épouvantable qu’il relate dans Misérable miracle, titre qui en dépit de sa musicalité résonne comme une condamnation de ces pratiques auxquelles il s’adonne et qu’il poursuivra cependant. Quand il reviendra sur cet épisode traumatisant dans Connaissance par les gouffres, il dira que celui qui est passé « météoriquement » par là est comme né une seconde fois. L’empathie avec laquelle il commentera certains dessins d’aliénés viendrait en partie de là. Il veut mettre son écriture au service d’un monde condamné au silence ou aux hurlements. Raconter la folie est une tâche titanesque. Michaux n’a sans doute fait qu’aborder l’île, je doute qu’il l’ait traversée de part en part. Il retient cependant quelque chose d’essentiel, d’autant plus important que parlant à tous, plus ou moins directement. Selon lui, ce qui caractérise l’aliénation, c’est l’étrangeté. L’étrangeté du corps de l’aliéné. Son corps ne lui appartient plus. Cette fameuse cénesthésie, sensation interne, globale, qui donne le sentiment d’être soi, d’habiter son corps comme sa maison, dans ces cas là devient malaise, expulsion de soi par soi ou par un autre. Sans son corps qu’il perçoit comme un autre, un double, ou, plus terrible encore, qu’il a la conviction qu’on lui a dérobé, l’aliéné est perdu. Plus de jouissance, un mot clé qui revient souvent sous la plume de Michaux quand il s’agit de décrire les états du corps et du psychisme.