La planète des normes est un roman de Jan De Fast écrit dans les années 70, belles années de la collection fleuve noir.
L’auteur y évoque un monde où l’esprit des humains est, tout comme le corps, entouré de soins qui lui « évitent », ainsi qu’à la société, tout dérèglement, tout dépassement de la normalité.
Pour cela, la solution idéale : la machine et les mots sans épaisseur de la « Norme »
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Alan progresse dans sa compréhension de cette planète où la Normalité semble absolue, hors quelques Déviants rapidement et « efficacement soignés« .
Grace à l’aide d’un Déviant, qu’il a sauvé d’une mort certaine par une opération « miraculeuse », l’envoyé de la planète Alpha parvient à gagner le lieu nommé « Trois Cent Un ». Il y a fait connaissance d’une des résidentes de ce lieu paradisiaque où tout est gratuit pour une partie de la population, l’autre étant au service de celle-ci.
L’heure avançant, il se mit à la recherche du restaurant suggéré par Lloa et le découvrit sans difficulté au début de la seule avenue perpendiculaire remontant vers l’intérieur, les lettres de l’enseigne dominant l’entrée mesuraient un bon mètre de haut.
C’était un vaste établissement comportant une succession de salles aérées par des grandes baies et des terrasses ombragées ; beaucoup de tables étaient déjà occupées mais il restait nombre de places disponibles. Il en choisit une suffisamment près de la rue pour que la jeune femme puisse facilement l’apercevoir lorsqu’elle viendrait.
Un maître d’hôtel qui ressemblait un peu au barman de la plage vint lui apporter la carte et prendre sa commande, puis une jeune serveuse à la jupe très brève et aux seins nus se mit en devoir de lui apporter les mets et boissons ordonnés et, comme dans le magasin un peu plus tôt, …
et n’aurait vu aucun inconvénient à servir de complément au dessert.
Il y avait sûrement des chambres discrètes à l’étage au sommet de cet escalier que, juste en ce moment, une dame d’agréable tournure était en train de gravir en compagnie d’un serveur très attentionné.
Ce serait toujours une consolation* si Lloa manquait à sa promesse mais pour l’instant il n’en était pas question d’autant que, depuis vingt-quatre heures, depuis le buffet de la gare de départ, Alan avait dû se contenter de quelques sandwiches et son estomac manifestait impérieusement sa vacuité. Il se sentait capable de dévorer même de la viande crue de phoque et comme par surcroît les plats que la jeune beauté lui apportait étaient excellents, il s’appliqua à leur faire honneur.
Cependant sa matière grise ne chômait pas et sans perdre une bouchée il continuait à échafauder des déductions.
Deux classes sociales donc, celle qui agissait « de l’autre côté des Normes » et celle qui la servait.
Mais d’où venaient-elles l’une et l’autre ? Qui les avait sélectionnées et comment ?
Pour la seconde, la réponse apparaissait relativement évidente, l’Envoyé n’avait pas oublié une certaine phrase du professeur Féhir au sujet du déviant récidiviste : quand les symptômes continuaient à récidiver, on envoyait les malades au « Trois cent un », donc ici. Après leur avoir fait subir sans doute une « normalisation » plus poussée…
Le barman de la plage était certainement dans ce cas, avec ce visage de savant austère qui aurait été bien plus à sa place dans un laboratoire que derrière un comptoir. La quasi imperceptible réaction qu’il avait eue quand Alan lui avait commandé son cocktail en termes de chimiste était significative.
Le maître d’hôtel du Ghâr semblait également de la même essence, un membre de cette classe trop riche en imagination et donc trop facilement sujette à l’indiscipline de pensée. Embarqué lui aussi dans le Domaine où il ne risquait plus de devenir un foyer de contagion.
Mais les autres ? La vendeuse du magasin, la serveuse du restaurant, les garçons, tous ceux-là étaient bien trop jeunes pour avoir déjà été atteints par la maladie du libre arbitre et avoir en plus rechuté après plusieurs traitements au Centre.
En outre, tous et toutes étaient physiquement séduisants et étaient loin de ressembler à la classique image de ces étudiants boutonneux et de ces sèches étudiantes à grosses lunettes que l’on rencontre d’habitude au sein des factions dites progressistes*.
Filles et garçons avaient été choisis par les Normes selon des critères parmi lesquels le physique jouait un rôle essentiel, conditionnés par une orthoneururgie particulière et expédiés par des trains automatiques spéciaux pour devenir en toute chose les serviteurs des Maîtres de Nontha.
Des esclaves au sens littéral du mot, mais des esclaves que les microlasers intracrâniens n’avaient pas seulement rendus totalement dociles et en plus modelés de telle sorte qu’ils aimaient leur esclavage et se montraient capables de partager le plaisir qu’ils donnaient. Les convois fermés qui traversaient le tunnel apportaient vraiment tout ce qu’il fallait, non seulement le nécessaire et le superflu, le ravitaillement et les objets de luxe mais encore la chair fraîche et celle-ci était consentante, pleine de joie de vivre, heureuse de servir ses Maîtres et de faire l’amour avec eux.
…
Restait le problème de ces Maîtres eux-mêmes. Toutefois là aussi l’Envoyé d’Alpha commençait à entrevoir quelques lueurs. Elles ne tarderaient pas à se préciser davantage quand Lloa viendrait le chercher.
Car elle, elle n’était pas une esclave, elle n’obéissait pas à un comportement imposé gravé dans ses neurones sous le casque d’un bloc opératoire. Elle était d’en haut, de la classe dirigeante. Et elle savait qu’Alan n’appartenait pas à Nontha.
* On peut être un peu choqué par la relative complaisance du héro (que l’auteur semble tenir en grande sympathie) ainsi par ce jugement qui pointe du côté du féminisme (activisme des femmes laides ??!)
Jan De Fast semble lui aussi avoir des « Normes » bien établies (sourire)²²²