15 Décembre 1904 …

… Paul Eluard, évoqué hier (dans ce lieu immatériel que je me permets de qualifier d’) ici, doit une partie de sa réussite, comme beaucoup d’autres surréalistes, en « début de carrière », à celui qui est né, dans la ville de Salonique et qui a fondé dans un modeste quartier de Paris une maison la maison d’édition GLM, dont le nom porte ses initiales, celles de Guy Lévis Mano
Voilà ce qu’en dit Francis Ambrière dans l’intransigeant du 12 janvier 1939

Une Librairie de la Poésie ? Elle nous manquait. Elle vient de s’ouvrir. C’est un joli cadeau pour les amis des lettres que nous fait là, si jeune encore, l’année 1939.
 Cette Librairie de la Poésie a tout ce qu’il faut, dès l’abord, pour séduire.
Vous pouvez parcourir la rue Huyghens dans toute sa longueur : je vous jure que vous ne l’apercevrez pas. Il est bon qu’une maison réservée aux poètes ne soit point d’un accès facile, et qu’il faille faire effort avant d’y pénétrer.
Sur le même trottoir que les puissants bâtiments des Editions Albin Michel, bastion du roman. — mais à l’autre bout — il vous faudra repérer une sorte de cour grise et nue. Le numéro 6 : c’est là. Entrez hardiment, allez au -fond, tournez une fois à droite, une fois à gauche : vous voilà dans une nouvelle cour, celle-là vaste et rectangulaire, sur laquelle s’ouvrent des ateliers de peintres. La première porte, tout près de vous, c’est la bonne.
Poussez -la sans crainte : Mme Marthe Pissarro vous y attend, tout environnée de livres…
C’est dans ce petit studio calme et retiré que sont nées, voilà cinq ou six ans, les Editions G. L. M.
Oh ! de modestes éditions ! Le jeune homme qui les a fondées et qui les a baptisées de ses initiales.
M. Guy Lévis-Mano, avait acquis à peu de frais des caractères, une presse, un stock de papier blanc, et s’était assuré-le concours de deux camarades. Tous trois aimaient d’un même amour la poésie et la typographie. De cette double passion naquirent quelques plaquettes min ces et ardentes, et l’on sut que l’avant-garde poétique avait enfin trouvé son point de ralliement. Après des jeunes comme Gisèle Prassinos, l’auteur de La Sauterelle arthritiques, des aînés à peine plus âgés, mais qui faisaient figure de guides — Paul Eluard, André Breton, Pierre-Jean Jouve — apportèrent leurs manuscrits à Guy Lévis Mano.
Les Editions G. L. M. étaient devenues le laboratoire, des recherches poétiques d’aujourd’hui. C’est conscient de ce succès spirituel — car pour l’autre il n’y faut pas compter ! — que Guy-Lévis Mano a décidé d’adjoindre à ses propres publications une Librairie de la Poésie. Tout ce qui paraît en France de jeunes revues in trouvables, de plaquettes éditées à grand’.peine dans de petites villes de province par des auteurs qui sortent du collège, tout ce qui s’imprime sur la poésie contemporaine doit trouver asile dans l’humble studio. Un centre national de documentation poétique ? Mais _ oui ; et une source d’enthousiasme où l’on viendra boire.
(…/…)
 Déjà M. Guy Lévis Mano s’inquiète de réunir les classiques de la jeune poésie. Il a réédité les Chants de Maldoror, et, après Lautréamont, il prépare une sorte d’anthologie où se grouperont tous les poètes qui se sont révélés après la guerre. Enfin, il inaugure une Revue murale qui, sur des panneaux de bois, offrira aux visiteurs un choix, renouvelé chaque mois, de poèmes manuscrits ou imprimés, de dessins, de photographies et d’essais typographiques. Tout n’est pas bon dans …

                            … morte.

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Ce que l’auteur de l’article ne mentionne pas, c’est la raison pour laquelle ces poètes surréalistes ont choisi ce petit éditeur.
Bien sur, il y a leur difficulté d’accès à de grande entreprise installées dans l’Edition, mais ce qui les a vraiment conquis est en rapport avec les talents de Guy Lévis Mano, dans les choix typographiques, la mise en page et aussi l’accord avec les illustrations (voir celle utilisé pour la grille destinée précédemment à ralentir la brulure vos yeux sur le texte.
Illustration destinée à Paul Eluard, dessinées par Valentine Hugo qui a exposé avec la plupart des peintres surréaliste – et eu une liaison avec Eluard- )

Ce que ne dit pas l’article est que Guy Lévis Mano est lui-même poète et a dirigé une revue de poésie. Revue apprécié ici par Madelaine Israël dans « L’Univers israélite » du 18 mars 1932

Il y a vraiment encore des faits héroïques : témoin cette belle revue de poésie « Minutes » que dirige Guy Levis-Mano.
Trois ou quatre fois par an, Guy Levis-Mano trouve moyen d’éditer de fort beaux poèmes dans une publication soignée et généralement avec de belles illustrations.
Celte fois-ci il s’est adressé à Jeanne Bergson. la fille de l’illustre philosophe, et à M. O. Klein pour, illustrer les poèmes sincères et émouvants de J. Vineuil : « Les rues sont grises ».
Jeanne Bergson avec force et chaleur, O. Klein avec grâce et séduction, ont rendu à merveille l’atmosphère de demi-réalité dans laquelle se meuvent les poèmes. Les deux dessinateurs ont trouvé de beaux accents pour dire la tristesse des rues qui vont vers le travail quotidien, le charme infiniment mélancolique des ciels d’automne et la lourdeur des corps ployant sous l’effort.
Ce sont de belles pages que celles-ci, qui méritaient d’être signalées.

Un poème de celui que ses amis appelaient GLM

de juin couleur d’automne
mois de juin trois brins d’or fanés
aux lèvres voyous du ciel
juin raté, printemps fantôme
mince décevant et nostalgique
comme un barbelé
Reproches reproches à l’automne
tous les épis ne seront pas moissonnés
Les hommes bras décharnés
comme arbres sans fruits
Reproches reproches à l’automne
pour les fruits qu’on n’a pas manges
Où est-elle ma confiance que je cherche
nourrie et cherchée et voulue
dix-huit cents nuits désertes
dix étoiles ont vainement doré la nuit
Dix-huit cents nuits
longues et frêles et préparées et parées
pour les aubes vierges guetteuses de poumons
Où sont les hommes aux revolvers salutaires
et aux yeux barrés de meurtres purs
Dix-huit cents nuits pour rien
et autant de jours plus blancs que les nuits.
Les cartes fabriquées aux murs
n’ont pas une ile où les vents soient des vents
Hommes sans poids comme girouettes aux vents
chaleur d’amour qui fond à la glace des étrangetés humaines
Il y a quatre murs
dedans un homme
il y a dix, cent,


un chant qui ne fait pas antichambre
pour pardonner
les dix-huit cents nuits

Guy LEVIS-MANO.

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