Le 10 Décembre 1870 …

… nait Pierre Louÿs qui produira une œuvre abondante et en partie teintée d’érotisme, dont sa poésie.

Au lendemain de sa Mort, dans la misère alors qu’il était paralysé et presque aveugle, comme c’est très fréquemment le cas pour ceux qui ont connu, après une période de gloire, l’oubli profond, la presse le redécouvrit et pour une part, lui reconnut du talent.

Ainsi, on pouvait lire dans le Figaro

Nous avons demandé aux quelques amis les plus intimes de Pierre Louÿs de vouloir bien évoquer pour nos lecteurs le-souvenir du grand écrivain disparu.

Le résultat de cette requête tardive, en faveur du disparu …

Réponse de Madame Rachilde

une adorable tête de jeune fille se tournait vers nous, osant, rire, une jolie petite blanchisseuse, que toute cette gaîté voisine surexcitait beaucoup.
Attention fit Pierre Louÿs, je-vais prendre la beauté au lasso Et d’un geste adroit il lança un serpentin qui s’enroula, au cou de la jolie, personne.
Je vois encore le poète et la beauté; unis par ce souple ruban de papier.
Quel était le prisonnier, des deux ?

Réponse de la Duchesse E. de Clermont Tonnerre

Pareil à cette nymphe Pierre Louÿs est déjà transmué en un marbre pur.
Le temps ne pourra altérer le grain glorieux de ses souples phrases.

Ce grand artiste verbal ne se laissa jamais entrainer par une débauche de mots.
Les images, voluptueuses qui flottaient à l’intérieur de sa pensée, sans emportement, il les fixa avec la précision d’un savant et le génie d’un poète.
L’auteur d’Aphrodite a laissé une Poétique où il enferme les lois sévères, qui furent siennes :

«Croire en la Muse. Lui offrir le silence et la solitude. Espérer sa grâce.»

L’éloge occupe une demi-page du journal, j’en donne ici la fin.

Cet artiste parfait avait trouvé un moule magnifique où couler ses belles phrases, et sa haute écriture violette inspira ces vers à une de ses amies :
«Flèche-fleur, il écrit, alignant des iris»

L’ensemble des témoignages tend à faire douter de l’isolement et de son retrait total à la fin de sa vie.
Une des réponses à l’invitation du Figaro révèle un (double) trait de caractère de Pierre Louÿs.

L’affection qu’il; portait à ses amis était sans bornes. Il fut tirés ému un jour que l’un d’eux lui récitât par cœur un poème de Paul Valéry qui venait de paraître.
Une fois, il ne put retenir ses larmes en rappelant une représentation du Faust de Marlowe monté par Paul Fort, aux temps héroïques de celui-ci, représentation à laquelle assistait Sarcey tout bouffi d’importance et de sottise et ricanant avec ostentation. « Jamais, disait Pierre Louys, je n’ai-senti à ce point ce qu’est l’envie de commettre un
assassinat
».

La poésie occupe une grande place dans l’œuvre de Pierre Louÿs.
Ce qui suit est extrait d’un long poème qui a pour titre « PERVIGILIUM MORTIS » (« VIGILE DE LA MORT »)

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— Nul ne peut abolir que par un jour d’automne,
Moi qui t’étreins ici, je ne t’aie emporté
L’encens, la myrrhe et l’or de ta divinité,
Le beau sang d’Aphrodite et le sang de Latone.

Nul ne peut, lorsqu’Amour se fit chair, menacer
Ni verbe ni mutisme oublieux ou vivace.
Le rythme de deux cœurs frappe et marque la trace
De deux pas, sur le sol, sur le roc du passé.

Que la mort, désormais, de ses mains

…esprit que penchent tes prunelles.

Comme au jour d’alliance où tu vins et pleuras
Sur nos destins épars, sur notre vie en cendres,
Ouvre sur moi tes yeux si tristes et si tendres.
J’enferme le bonheur tout entier dans mes bras. »

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