19 Décembre 1952 …

… à Villejuif est décédé le poète Jacques Dyssord




qui, après avoir connu le succès et la reconnaissance de ses pairs, a eu le tort de participer sous l’occupation à des journaux favorables à l’envahisseur comme l’APPEL ou La FRANCE AU TRAVAIL (devenue par la suite LA FRANCE SOCIALISTE)
Ce qui lui a valu d’être interdits par le Comité national des écrivains et l’a contraint à se retirer de la vie littéraire

A lire, à propos de la critique d’un de ses livres, l’opinion que le rédacteur de l’article a de Jacques Dyssord, il est difficile d’imaginer sa collaboration au régime de Pétain … et pourtant.

Jacques Dyssord a gardé du post-romantisme le goût de la canaille. Une culture vaste et sans affectation. Une quotidienne simplicité. Un goût profond de l’art d’écrire, et, derrière un parti pris apparent, une pudeur, qu’il aime à vaincre et à humilier.
 Par le miracle du don qui fait de Jacques Dyssord un poète, ainsi que le dit Billy, « il réussit à ne pas s’encanailler ». A moins que, au contraire, il faille écrire que << l’auteur ne réussit pas à s’encanailler ». Dans tous ses livres, nous retrouvons cette  allure, ce chic de seigneur né. cette ironie que voile une tendresse enfantine.
 Dès les premiers recueils de poèmes, Dyssord s’imposa. Sa muse avait des accents personnels, graves, amers. C’étaient Le dernier Chant de l’intermezzo, On frappe à la porte, Tropes.
 Puis, Jacques Dyssord commença son œuvre de romancier. Il s’attacha à la peinture des milieux interlopes, des bars, des petites poules. Il découvrit le Montmartre d’après la guerre avec acuité et nonchalance. Il y a, dans ces romans, du Carco et aussi du Duvernois : de la brutalité et de la tendresse
 apitoyée. Ce sont : La Paroisse du Moulin-Rouge, Charlie chasseur, Les Faisans, L’Amour tel qu’on le parle.
 Essayiste, historien, nous lui devons un livre charmant sur un homme qu’il comprit bien : L’Aventure de P.-J. Toulet, gentilhomme de lettres, et puis Joë, ou la découverte du vieux monde, une Ere amoureuse de la Dame aux Camélias, un Steinlen, un essai sur le journalisme : La Confrérie de la dernière heure.
 Il y a, disait quelqu’un du moraliste, chez Dyssord. Possible.. Mais il me semble surtout un esprit curieux de la misère humaine, souvent attendri, fraternel, compréhensif des faiblesses de ses semblables.  C’est cette pitié qui donne sa signification au nouveau livre de Ucques Dyssord : Londres secret perditions de la Madeleine.
 C’est un reportage documenté, comme celui qu’il fit dans les bagnes d’enfants. C’est une peinture fidèle du « milieu londonien », de la pègre qui fit la gloire spéciale de Whitechapel, aujourd’hui hui embourgeoisée. Si Whitechapel est composé de paisibles rues modernes, il demeure encore un Londres secret, celui de Limehouse, de West-lndian rad. Jacques Dyssord nous y fait pénétrer avec cette puissance d’évocation, cette simplicité vraie qui est l’art du poète.
 Un joli livre, édité avec soin sur un milieu peu connu.
 J. C.

On reconnaissait donc à cette date (27 Novembre 1932) la qualité et même le naturel (si tant est qu’il existe) de poète.
Goutons voir quelques uns de ses vers …

LA PARABOLE DU TEMPS PERDU

FRAGMENTS

I
Don Juan qui fil sauter la banque
Dans ce tapis franc de pipeurs,
Sent qu’à la fin le cœur lui manque
Et tend les dés au commandeur.
Quand s’allumèrent les persiennes,
Ne resta-t-il pas trop longtemps
Quelle des ombres était la sienne
A chercher des derniers passants?
Qu’à ces travestis qui lut plurent
Et ces vices mal dévêtus
Ne préféra-t-il l’aventure
Du dernier vous au premier tu?

II
Qu’espère son âme incertaine
Des courants d’air d’un carrefour
Où ne se

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      … à la rhétorique
D’un pardon offert à pleins bras,

A moins, titubant sous l’armure,
Ivre de n’avoir pas vécu
Que la combien triste figure
D’un Don Quixotte saugrenu?