20 Novembre 1900 …

… en cette année, crépuscule du dix huitième siècle, nait un homme*, qui développa une activité intense au service de la poésie, et cela bien au-delà de son œuvre propre, à travers des publications accueillantes (revue « Sagesse« ) et la participation active à des groupes (surréaliste , anticolonialiste).

Ici une appréciation de la personne et de l’oeuvre de *Fernand Marc, dans laquelle on trouvera de nombreux reproches,** par le critique et poète André Fontainas qui, mieux qu’un éloge, permet d’approcher le projet et la nature de ses réalisations poétiques.

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**Dont ce terrible « Curieux travail, plutôt que satisfaisant. » !

M. Fernand Marc est, on le sait, avec son groupe « Sagesse », un grand animateur.
Si épris soit-il, à la manière des esprits de son âge, de l’étrangeté pour l’unique souci de l’étrangeté, il n’a pas rompu les ponts, il ne croit pas que le monde date de l’an 1918, où l’homme échappa à la servitude des tranchées et de la mort brusque, pour vivre enfin selon l’Amérique.
L’humanité renouvelée ne forme point, à ses yeux, l’humanité entière. Au contraire, il a exprimé à maintes reprises, pour les génies d’époques antérieures, son respect, et de la tolérance avec sympathie pour ceux qui l’ont précédé et qu’il n’ignore pas de parti pris.
Les Quatre poèmes qu’il réunit dans une élégante ou même somptueuse plaquette, ornés de compositions originales de Jean Marembert, illustrent cet état d’âme, et la dédicace au grand, conscient et émouvant poète qu’est M. Jules Supervielle, en souligne la portée.
Comme ses pairs, M. Fernand Marc prend à tâche d’accumuler seulement, dans une volonté de confusion, les matériaux divers dont l’image ingénue ressortira au gré de la sensibilité du lecteur, mais à chaque poème correspond une composition gravée, suggestion réfléchie où se réalise en partie une première ordonnance proposée de ces matériaux à l’intelligence.
Spontanément ainsi, on le sent, bigarrée, ingénue aussi et singulière avec application, l’imagination de M. Fernand Marc s’occupe à se tracer des limites, à se restreindre et à s’observer non sans rigueur plutôt qu’à se surprendre dans la surabondance ou l’abandon.
Curieux …

… du poème, est répudié avec dédain; il sied que la possibilité d’un rythme soit évoquée, ce serait être conforme que de s’y soumettre et cela ne vient pas du subconscient individuel, c’est une règle.
J’admets l’intérêt des expériences, on dirait de laboratoire, poursuivies par un certain nombre de poètes
nouveaux, mais ne se lasseront-ils de ne jamais faire appel qu’à de la singularité? il existe un art, aussi, qui participe du choix approprié, de la durée et de la résistance de la construction; tout s’ordonne, une part dépend d’une autre et du tout, le poème existe doublement, par le détail et par l’ensemble.

(Pour lire la grille plus facilement, cliquer ici)


Un article à propos de la production de Fernand Marc  » les enfants sinistres » (qui a été mise en musique par Louis Saugier (voir ici))

Notre camarade le poète Fernand Marc vient de sortir un petit livre plein de charme et déconcertant qu’il intitule : quatre-vingts comptines pour enfants sinistres.

Mais objectera-t-on à Fernand Marc, peut-il y avoir des enfants sinistres ?
— Mais oui. Les enfants sinistres ce sont

… politiques gaspillent en vain leur science pour guérir ce mal du siècle. Rien n’y fait.
Alors, se présente le poète. C’est lui qui rendra le sourire aux enfants sinistres,
alors de nouveau il sera possible d’habiter la terre.

Les comptines de Fernand Marc berceront la peine des vieux enfants.
Elles leur remettront à la bouche le goût des sucres d’orge du concierge du collège, elles leur redonneront les échos attendris des ritournelles des vieilles nourrices bêtes et bonnes, la joie des jeux du jeudi où l’on se compte avec des Am-stram-gram compliqués, l’étrange tiédeur des premiers fantômes d’amour et tout l’enthousiasme de n’avoir à penser qu’à des choses inutiles pour grandes personnes.

Je recommande le petit bouquin de Fernand Marc à tous les enfants sinistres.


Tout le monde doit donc le lire.


Une de ces comptines :

Avec la plus belle
je veux jouer à la marelle,
avec la plus douce
manger du couscous,
avec la plus tendre
visiter Port -Vendras,
avec la plus cocasse
chasser la bécasse,
avec la plus blonde
me mêler à l’onde,
avec la plus brune
consulter la lune.
avec la plus sage
blanchir ce feuillage
avec la folle
prendre mon envol.

Ici, le poème « Sérénité » … pour les « Grand »

Cet équilibriste rose
crinière dressée
pur le trapèze des nuages
cet homme nu
qui désarme l’onde
broute les herbes de la mort
et franchit les mondes
à longues foulées silencieuses
dans la nuit des regards
que peuvent-ils
Plainte des menhirs de sable
craquements vierges de la forêt
dialogue de la mousse et des moussons
orgues des palais clameurs des races
cliquetis des astres se heurtant
dans leur ronde
ne sont que murmures d’anges
caressante chanson de l’espace
aux oreilles du dieu
qui somnole

éternellement

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Ce qui exclut Fernand Marc (sourire)²


En ce même 20 Novembre, il y a 10 ans, Anna Jouy donnait

« Arrêt sur image »

… à quoi bon le reste de la ville. ce grand vide de gens, d’autos, de chiens, quadrillé de moellons fantastiques et moi enfin minuscule, très.