9 Novembre 1912 …

… Mon journal (recueil hebdomadaire illustré pour les enfants de 8 à 12 ans) publie une petite fable de Pierre Courtois

fable destinée à encourager les jeunes lecteurs à développer leur volonté de manière à atteindre, sans trop de crainte, les objectifs qu’ils se donnent et à parvenir à… manger la poire.

(extraits)

Maître Couart, le lièvre, avait, un jour, quitté
Le gîte qu’il occupe au bord du. bois
L’été Rayonnait sur les champs tranquilles,
Les toits étincelaient, leurs tuiles
Avaient la couleur des coquelicots.
Tout chantait : hommes et feuillage
Et les coqs lançaient leurs cocoricos.
C’est un plaisir de partir en voyage
Par un jour comme, celui-là !
Et Maître Couart s’en alla,
Plein de bravoure à l’aventure,
Tel un touriste heureux, sans presser son allure.
(…)
Il ne négligeait pas cependant d’écouter,
Les oreilles au vent, le moindre bruit qui passe,
Puis il repartait d’un élan,
L’arrière-train- en l’air, sautant, dansant, roulant,
Jusqu’à ce que, l’allure lasse,
Il s’en vint se blottir à l’ombre d’un poirier.
(…)
Un mulot qui sortait de terre
Le voit et se sauve…
Un lézard dormant
Se réveille ; il a peur, cherche de la poussière
Pour s’y réfugier et file en zigzaguant…
Maître Couart d’abord s’agite :
Il est prêt à prendre la fuite,
Puis, s’étant rassuré, dit d’un ton arrogant : « On me craint, c’est notoire,
(…)
Vit-on jamais des poltronnes pareilles ?
Être poltron, ça n’est pas mon défaut. »

…il aperçoit un fruit
Que porte une branche qui penche. « Ce fruit me conviendrait ; je l’ai bien mérité
Pour avoir aussi bien trotté. 
Ah ! si le vent pouvait secouer cette branche ! »
Pensa maître Couart. 
Or le vent qui passait
Comprit ce qu’il pensait.

Il ébranla la branche et fît tomber la poire
Sur le nez de maître Couart.
Aussitôt le poltron vantard
Bondit, plein d’épouvante et, jusqu’à la nuit noire,
Il court comme un lièvre affolé, 
Les oreilles contre l’échine.
La peur aux reins, il court et le ressort musclé
De ses pattes d’acier active sa machine : 
Il voudrait s’arrêter, mais toujours le …

(Pour lire la grille plus facilement, cliquer ici)

…encor

16 Septembre 1834 …

… date du décès d’un poète, dramaturge, fabuliste et homme politique : Antoine-Vincent Arnault

Cette dernière qualité, et notamment sa proximité avec Napoléon I, qui lui a à plusieurs reprises confié des rôles d’importance, lui a valu d’être élus deux fois à l’Académie Française, car radié 13 ans après sa première élection (nommé ministre de l’Instruction publique par intérim pendant les Cent-Jours)

On lui a reproché, et on l’a admiré, pour la qualité incisive de sa plume.

Ici un passage de « ΜΟΝ PORTE-FEUILLE DE LA VANITÉ. »
La rubrique Caractère.

QU’EST-CE QU’AVOIR DU CARACTÈRE.

Commençons par définir le mot caractère dans ses principales acceptions.

Au physique ainsi qu’au moral, le caractère n’est-il pas ce qui distingue l’espèce dans le genre, l’individu dans l’espèce?

Les peuples, les hommes, les animaux ont des formes, des traits, des inclinations, des habitudes qui leur sont propres. C’est ce qui constitue leur caractère.

Ce mot s’applique naturellement aux productions des arts. En peinture, en sculpture, on appelle tête sans caractère la tête qui n’exprime rien. La même chose se dit d’une musique insignifiante. En architecture, un édifice manque de caractère quand ses ornements ne sont ni conformes aux règles, ni analogues à l’usage pour lequel il est construit. Dans le premier cas, caractère est synonyme d’expression, et de style dans le second.

Le nom de caractère se donne aussi à des pierres fines ou à des pièces de métal empreintes de certaines figures auxquelles on attribue des vertus extraordinaires, en conséquence de leur rapport avec la constellation sous laquelle elles ont été gravées ou fondues.

Dans le sens général, caractère indique ces qualités morales, ces vertus ou ces vices qui dominent dans l’individu et forment pour ainsi dire la physionomie de son âme. En ce sens, le caractère est dans l’homme ce que l’instinct est dans l’animal: c’est la tendance à laquelle il obéit s’il n’est réprimé, et à laquelle il revient dès qu’il est redevenu libre.

En ce sens, chaque homme a son caractère ; celui-ci n’est pas plus fait pour garder une …

… renard.

Dans la locution qu’on analyse ici, caractère a un sens tout différent, un sens tout-à-fait particulier. Avoir du caractère, c’est avoir une volonté ferme, opiniâtre, inébranlable. A ce titre, que de caractères avec lesquels le caractère est incompatible! L’irrésolu, l’inconstant, l’insouciant, l’inconséquent, sont des caractères très prononcés, et cependant tout-à-fait dépourvus de cette persévérance qui constitue le caractère proprement dit.

Les hommes de ce caractère sont des cires molles le premier venu, sans beaucoup d’adresse même, pétrit et modifie à sa guise. C’est Prusias qui change de résolution suivant qu’il se trouve avec Annibal ou Flaminius, c’est M. Cassandre qui est toujours de l’avis du dernier qui parle.

L’homme de caractère est au contraire celui qui manie ́les autres, celui que la nature a fait pour maîtriser les hommes et les choses. Sa parole a l’accent de l’autorité, son visage l’empreinte de la supériorité.


On pourra percevoir ici, la sensibilité de l’auteur à des « caractères » de la trempe de Napoléon I.


L’auteur de fable … par-dessus les siècles peut encore parler à notre oreille … interne (ou inerte ?)

Ces dés qui, chassés d’un cornet
Pour être agités dans un autre,
Par un canne ou par un sonnet
Règlent ma fortune et la vôtre ;
Ces dés tout écornés, n’en retracent que mieux
Le sort d’un pauvre peuple aux mains des factieux ;
Par l’intérêt des chefs tiré de l’inertie,
Ballotté, non sans bruit, au gré de leurs fureurs,
Il s’écharpe, il s’échine. Et pourquoi ? je vous prie.
Pourquoi ? pour varier les coups d’une partie
Qui ne profite qu’aux joueurs.

(pour d’autres fables de Antoine-Vincent Arnault : source