3 Décembre 1999 …

… est la date du décès de Jean Bouhier,

poète engagé dans la résistance poétique lors de la seconde guerre mondiale qui exprimait la nécessité de cet engagement, et de sa généralisation, un an après la fin des combats.

« Il ne nous appartient pas de dire ce que sera l’art de demain. Pour ma part, face aux événements, j’ai dû redevenir un homme alors que je n’étais plus qu’un cerveau. Je suis persuadé que la lutte clandestine a débarrassé la littérature de tous les snobisme et qu’il ne nous est plus possible, maintenant, de faire des cloisons.
Le secret d’un art durable est d’être humain, c’est-à-dire d’être expression d’un moment social. (Cf. Homère, La Chanson de Roland, Corneille, Hugo, etc.)
Méfions-nous de la volonté.
Il vous faut d’abord assimiler, en tous les domaines, toutes les incidences, tous les phénomènes avant d’être en mesure de les dominer et de les digérer »

« L’art gratuit n’a jamais existé. C’était un mot. Il ne peut y avoir d’art qui ne soit engagé. Je trouve puériles les discussions actuelles. On ne choisit pas une position par simple caprice ou par intérêt. La
guerre a permis de crever l’abcès et de nous désintoxiquer. A nous, redevenus des hommes de construire un véritable humanisme, c est-à-dire une société permettant le plein épanouissement de l’homme et non pas uniquement de l’homme-moral. Que nos œuvres soient le reflet de nos préoccupations, de nos luttes, cela est une condition de leur valus. Les jeux et les spéculations sont du domaine de l’hypocrisie et de la dégénérescence mentale. Il nous faut agir comme les autres hommes pour mieux traduire leur héroïsme »

Et de conclure sur une prophétie … qui ne s’est pas vraiment réalisée

Nous sommes arrives au moment où il faut choisir. Il s’agit ni plus ni moins que de vivre. Il n’est plus de désintéressement possible. C’est la leçon que nous devons tirer de l’histoire de notre lutte récente.
Tant de meurtres ont brusqué l’évolution ont libéré le véritable artiste, qu’il nous est permis de penser que I’art suivra le monde qu’il représente et que la littérature « mondaine » disparaîtra avec les derniers
échantillons de l’espèce. La société montante qui incarne la lutte prolétarienne sera la raison de l’art qui commence à naître.
A chacun de nous de savoir subir, pour mieux participer et mieux créer. Restons seulement, simplement à hauteur d’homme

Ici, deux extraits d’un recueil de Jean Bouhier écrit en 1941 (au plus fort de la guerre)

Crache dans tes mains pour prendre le manche de ta pioche, gagne ton pain
à la sueur de ton front, Adam déchu, homme de matière à la conquête de la
matière.

et :

Toi, homme parmi les autres, mais toi seul à te connaître véritablement toi-même, tu sais qu’on ne possède jamais ce que l’on prend. Tu sais qu’aucun argent, aucun commerce, aucun bénéfice, aucun échange, aucun don, aucun héritage ne peut légitimer, ne peut excuser ce qui n’est qu’un vol.

!!

L’engagement du poète s’est par la suite transformé en engagement politique, la poésie ne semble pas avoir suivi.
Quelques poèmes édités dans les années 1960 ne sont pas dans la veine que prédisait Jean Bouhier.

Il n’est pas celui que l’on retient d’un groupe (l’École de Rochefort) que Jean Bouhier a fondé pendant la guerre.

L’un de ces poèmes

À portée de la main
Un simple objet
Que l’on caresse

À la porte entrouverte
Un simple ami
Que l’on attend
À l’ombre du …

… simple geste
Que l’on fait

Aux silences du cœur
Un simple cri
Que l’on écoute
Et pour l’amour
Un simple mot
Que l’on répète

(Pour lire la grille plus facilement cliquer ici)

Tercets de la vie simple, © Traces 1963


motslies.com te ralentit la lecture sur quelques mots