8 Octobre 1909 …

le Messin (Quotidien, organe des intérêts Lorrains) donne une critique de « La dame aux Camélia« , loue l’interprétation de Sarah Bernard … et interroge sur les réactions contradictoires que l’on peut avoir, seul ou immergé dans une salle, relativement à des faits qui engagent les sentiments et la morale.

(L’article)

Elle est archiconnue, battue et rebattue cette pièce, plus que cinquantenaire, et elle ne manque jamais son effet. On la croit usée jusqu’à la corde et elle résiste, fourbue, et elle tient debout. Elle a des…

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… dans les « Rieuses » et c’est à peine si l’on y prend garde, emporté qu’on est par le mouvement passionné du drame.
Le public vient pour Sarah Bernhardt, et il est certain qu’elle signe le rôle; mais ce public a beau se donner à l’interprète, la pièce le prend aux entrailles; et, dans cette salle du théâtre de Metz, presque bondée du plancher au plafond, se produit un curieux phénomène de psychologie des foules:
De l’orchestre au paradis, il n’est pas un homme, jeune ou vieux, pas une femme, mère ou enfant, pas un spectateur enfin qui, pris à part, ne hausserait les épaules, donnant également tort à Armand Duval, un naïf, pour s’emballer ainsi dans le plus absurde des collages, et à Marguerite Gautier, une sotte pour oser rêver d’amour pur dans le dévergondage ; et cependant tout ce monde groupé, « collectivé »

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…contre le sens commun de la morale sociale.
Ample matière à dissertation pour les êtres romanesques.
Pour que la foule échappe à cet entraînement, il faudrait que les deux amoureux fussent au-dessous du médiocre, et Mme Sarah Bernhardt a toujours été au-dessus du très bon dans le rôle de la dame aux camélias.

Il semble que sa conception générale du rôle se soit quelque peu modifiée depuis qu’elle l’aborda pour la dernière fois sur notre scène, il y a sept ans. Nous avons cru constater qu’elle a surtout prodigieusement développé les ressources déjà triomphales de sa plastique, étendant le registre de ses soupirs et de ses sanglots, et ajoutant plusieurs octaves au clavier de ses gestes et de ses attitudes. De là une nouvelle répartition des effets qui se concentrent sur les scènes où la parole cède le pas aux jeux de physionomie et aux mouvements du corps, où le mot s’étouffe et s’essouffle, où l’éloquence de la mimique suffit é l’expression du sentiment et é l’émotion du spectateur, où l’agitation scénique tourbillonne en une sorte de cyclone qui emporte tout. De là une prépondérance de succès assurée au troisième acte, et surtout au monologue désespéré qui suit la conférence désespérée du père Duval ; et au 4e acte, scène de jeu et scène finale, la fameuse scène des billets de banque, enlevée avec une furie de violence vertigineuse.
Même en ces dialogues avec Armand, qu’elle lui cède ou qu’elle le repousse, Marguerite a plus de précision dans les flexions de son cou et de sa taille, dans les adhésions ou les protestations de ses bras que dans les explications de son langage. Mais l’actrice a la ligne et c’est un art souverain qui dirige cette interprétation dont l’aphonie même est .

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… ? Et tout le monde pleurait.
M. Henry Roussel, Armand Duval, était le digne partenaire de Mme Sarah Bernhardt, qui a été non moins chaleureusement acclamée qu’elle le fut lors de ses précédentes apparitions sur notre scène. Dans cette nouvelle tournée qu’elle entreprend en Allemagne, son talent incomparable et la supériorité des artistes qui l’entourent, comme Henry Roussel, feront toujours aimer partout les belles lettres françaises.
Nul doute qu’elle ne rencontre un aussi chaleureux accueil qu’à Metz dans toutes les villes où elle va s’arrêter dans sa tournée.