16 Aout 1870 …

Intervention pugnace de Gambetta à l’assemblée

[Relatée dans le figaro, par  Edmond Magnier (directeur de rédaction) présent à cette séance ]

Voilà Gambetta campé devant la tribune. On peut critiquer l’amertume de ce langage, mais on ne peut pas se défendre d’en admirer la fougue, l’élan, la mâle, beauté. Le lion de la gauche a été sublime une fois de plus.
Il accuse le ministère, ou de ne pas savoir, ou de ne pas dire ce qui se passe sur le théâtre de la guerre. Il cite la dépêche affichée ce matin, dimanche, pour annoncer la prise de Nancy qui a eu lieu le vendredi 12.
Il somme le gouvernement de dire pourquoi il a, réfuté, le samedi 3, cette nouvelle, par un avis placardé sur les murs de Paris. L’émotion était grande et allait croissant parmi’ les députés et dans la salle. Mais les cœurs ‘ont battu à crever les poitrines et loi yeux se sont -mouillés do -larmes quand
Gambetta a lu un lambeau de l’Espérance de Nancy, racontant les faits dans leur triste vérité. « Quand un pays est gouverné par des incapables, s’est-il écrié, il a le droit de réclamer, par ses représentants, un comité national qui pourvoie à sa. Défense. » Les exclamations se croisent, les cris éclatent.
M. Achille Jubinal a-t-il fait un geste ou lancé un signal ? Je n’en sais rien. Mais ‘Gambetta. -l’apostrophe, lui et la droite, avec une grande violence. Pour vous, dit-il, qui avez, par vos complaisances, préparé ces -fatals -évènements, vous devriez vous condamner au silence et aux remords.
Mais c’est de l’insulte ripostent cinquante voix.
Ah ! poursuit le tribun, dont !es yeux lancent des éclairs, rappelez votre conduite, c’est là que vous trouverez l’injure.
Et aussitôt il revient à la question.
Il reproche au gouvernement d’écarter …

… avant le salut de la patrie ? »


Sur ce dossier épineux d’une guerre qui a été funeste à la France, Gambetta n’est pas tout blanc.
En effet il a été signataire du « programme de Belleville » qui comportait ces lignes :

« Nous voulons la suppression des armées permanentes, cause de ruine pour les finances et les affaires de la Nation ».

Dont une des conséquences a été une pression sur le gouvernement qui n’a pas été sans conséquence quelques années avant le début de la guerre :

« Cédant à cette pression, la Chambre réduit donc les effectifs de 10.000 hommes, ainsi que les crédits pour le fourrage des chevaux, et ampute d’un tiers ceux proposés pour l’aménagement des forteresses de l’Est, dépense pourtant d’ordre typiquement défensif ! »

source : LES RESPONSABILITÉS DE LA DÉFAITE MILITAIRE DE 1870