« Je n’avais plus rien à manger, ni très envie d’aller au Géant Casino, le début de soirée était une mauvaise heure pour faire les courses dans ce quartier populeux, mais j’avais faim et plus encore j’avais envie d’acheter à manger, de la blanquette de veau, du colin au cerfeuil, de la moussaka berbère ; les plats pour micro-ondes, fiables dans leur insipidité, mais à l’emballage coloré et
joyeux, représentaient quand même un vrai progrès par rapport aux désolantes tribulations des héros de Huysmans ; aucune malveillance ne pouvait s’y lire, et l’impression de participer à une expérience collective décevante, mais égalitaire, pouvait ouvrir le
chemin d’une résignation partielle.
Curieusement le supermarché était presque vide…

…le mot de « couvre-feu », sans raison précise, me traversa l’esprit. Certaines des caissières alignées derrière leurs caisses désertées écoutaient leurs transistors : la manifestation se poursuivait, on ne déplorait pour l’instant aucun incident. Cela viendrait plus tard, après la dispersion, me dis-je. »
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Extrait du roman « Soumission »
de Michel Houellebecq
Parcours de lecture
En clair sur babelio
(extrait complet)
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Je n’avais plus rien à manger, ni très envie d’aller au Géant Casino, le début de soirée était une mauvaise heure pour faire les courses dans ce quartier populeux, mais j’avais faim et plus encore j’avais envie d’acheter à manger, de la blanquette de veau, du colin au cerfeuil, de la moussaka berbère ; les plats pour micro-ondes, fiables dans leur insipidité, mais à l’emballage coloré et joyeux, représentaient quand même un vrai progrès par rapport aux désolantes tribulations des héros de Huysmans ; aucune malveillance ne pouvait s’y lire, et l’impression de participer à une expérience collective décevante, mais égalitaire, pouvait ouvrir le chemin d’une résignation partielle.
Curieusement le supermarché était presque vide. Je remplis mon caddie très vite dans un élan d’enthousiasme mélé de peur. ; le mot de « couvre-feu », sans raison précise, me traversa l’esprit. Certaines des caissières alignées derrière leurs caisses désertées écoutaient leurs transistors : la manifestation se poursuivait, on ne déplorait pour l’instant aucun incident. Cela viendrait plus tard, après la dispersion, me dis-je.
